Attitude et état d’esprit de tout intervenant auprès des tout-petits

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L’animateur n’est ni un faire valoir ni un amuseur au sens stricte du terme. Il n’est pas là, non plus, pour apprendre quelque chose à des enfants âgés de 0 à 3 ans. Il ne vient pas exposer une connaissance acquise, simplement pour la soumettre de temps en temps à des enfants qui sont portés vers le monde.

Il doit évidemment avoir acquis des compétences dans son domaine (chant, musique, contes,…). Mais cela n’est pas suffisant.

L’animateur est un être à part entière investit d’une conscience. Et celle-ci doit être remplie d’une connaissance de son propre Être. Cela implique un travail sur soi.

Pourquoi ? Et qu’est-ce que cela veut dire ?

Un enfant de 0-3 ans (0-6 ans) est un être avant tout sensoriel. Il agit et réagit d’après ses sens. Il est un être dans l’instinct pur. Tous ses sens lui permettent de se mouvoir, de voir, de manger, de sentir, de toucher,… Comme nous, me diriez-vous ? Oui, mais pas tout à fait. Avant l’âge de la puberté, l’enfant sens les choses de manière plus directe et entière. Tout son corps sent ! Cela implique que tout ce qui se passe dans son environnement proche, il le ressent dans tout son corps, dans tout son être. Il n’y a aucune barrière, aucune limite, aucune distinction. Il ne sépare pas les choses. Les événements sont ressenties en vrac.

Ceux-ci sont, de plus, enregistrés dans tout leur être psychique.

Ce qui implique une vigilance encore plus grande quand on s’adresse à des enfants.

Il ne s’agit pas encore d’êtres intellectuels. Plus tard, ils pourront distinguer et séparer les choses, les imaginer, les transposer et les comparer. Ils pourront prendre du recul en s’aidant de leur mental, de leur pensée et de leurs expériences.

Mais jusqu’à un certain âge, leur cerveau, leur stade d’évolution, ne leur permet pas de le faire. C’est un fait.

Ce qui m’oblige à écrire sur l’attitude que doit avoir tout intervenant auprès des petits enfants.

Les enfants, quand bien même leurs sentiments n’arrivent pas à une parfaite clarté, ils sentent s’élever en eux, des sympathies, des antipathies, des impressions, grâce auxquelles ils savent si celui qu’ils rencontrent peut devenir leur ami ou si, au contraire, ils préfèrent s’en éloigner.

Pour cela, tout intervenant auprès de petits enfants doit obligatoirement avoir fait une étude quand à son propre être, son propre comportement face aux autres, face aux événements de la vie. Il doit se connaître au sens où la philosophie le détermine. Connais-toi toi-même. Il faut qu’il développe en lui un regard intérieur capable de percevoir ce jeu subtil et fuyant des courants énergétiques qui s’établissent entre les êtres. C’est seulement comme cela que l’on peut comprendre chaque être en soi.

Trop souvent, à tord, nous envisageons l’enfant qu’à un certain stade de sa vie. On le découpe en tranche, dans les crèches, les maternelles, les primaires,… Ou tout autre découpage physiologique possible.

Nous oublions bien souvent qu’il y a en tout être, une continuité. Il n’y a pas de séparation entre moi maintenant et moi quand j’étais petite. Des souvenirs peuvent surgir et me ramener à ma petite enfance comme si c’était hier.

Si vous connaissez tous, la madeleine de Proust et que vous comprenez ce que cela veut dire, alors vous comprenez qu’on ne peut pas dire cette phrase si souvent entendue : « Oh! ne t’inquiète pas, ce n’est qu’un enfant, il aura vite fait d’oublier ».
Sachez que si son mental oublie les phrases ou certaines situations de manière consciente, son corps/être lui, enregistre comme un ordinateur tout ce qui se passe. Et plus encore, quand il s’agit d’un tout-petit. C’est encore plus intense, plus vivant, plus vrai. Oui vrai! Car adulte nous pouvons faire la différence entre une blague (supposé faux) et le vrai. Mais un enfant de cet âge, prend tout au premier degré, comme on dit. Il avale les impressions, les sentiments, les émotions, les colères,… en bloc.

Nous devons être extrêmement vigilants avec les tout-petits. Vigilants sur les mots que l’on prononce mais surtout sur les sentiments qui nous habitent et qui rayonnent tout autour de nous.

IMG_1649.jpgNous ne sommes pas des êtres automatisés. Nous exprimons sans cesse à tout instant des humeurs, des émotions. Parfois, nous disons des choses en pensant à d’autres choses, ou même son contraire.
Le tout-petit perçoit ces changements d’humeur, ces contradictions.
Et comme vous, il les interprète dans son corps par des ressentis musculaires et nerveux.

Vous ne vous êtes peut-être par rendu compte, mais si vous mentez, votre corps le montre. Parfois, il ne le dévoile pas de manière visible à tout le monde, mais votre corps réagit à deux informations contradictoires. Je dis quelque chose mais je sais que ce n’est pas vrai.

Il a été prouvé scientifiquement que notre visage quand on ment montre par des mouvements spontanés et involontaires, la contradiction entre le langage et la pensée. Dans le corps, c’est exactement la même chose ! Les tensions sont perceptibles à travers les vibrations qui émanent des cellules du corps (système nerveux essentiellement).

Les effets de la prise en charge des tout-petits pénètrent profondément dans sa nature physique, psychique et spirituelle. Et ces germes, déposés en lui au début de la vie y demeurent latents, poursuivant une vie sous la surface de la conscience, jusqu’au jour où ils se manifestent d’une façon remarquable, souvent au bout d’un grand nombre d’années, parfois même vers la fin de sa vie d’homme. (Rudolf Steiner)

Nous nous trouvons en face de l’opinion courante d’après laquelle il suffit de savoir soi-même une chose pour être capable de l’enseigner et pour avoir le droit de le faire. Cela s’appelle avoir un diplôme.

Je dis qu’il faut plus que ça. Et ceci est d’autant plus vrai, si l’on s’adresse à des tout-petits.

« Si l’on connaît les relations mentales qui existent entre le maître et l’enfant, …, on constate que, pour la première époque de la vie, celle qui va de la naissance jusqu’à la deuxième dentition, les connaissances acquises par le maître ont pour l’enfant peu d’importance. Ce qui importe, par contre, au suprême degré, ce sont les impressions que l’enfant reçoit à travers lui, et la possibilité pour lui de l’imiter.«                                               Education des éducateurs, Rudolf Steiner, pg 25

Voyez comment un tout-petit réagit à chaque émotion de sa maman. Voyez comment il ressent l’état d’esprit de l’adulte à travers le moindre mouvement de la main, la moindre expression du visage, le moindre regard, et comment il laisse ces vibrations résonner en lui.

Ainsi, chaque petit se façonne tout doucement dans ce monde. Il évolue à travers l’imitation propre à sa nature. Il évalue selon son ressenti. Et va vers son futur être à travers ses expériences corporelles et psychiques. Au début, elles ne sont pas intellectuelles. L’intellect se forme au fur et à mesure et prend son temps pour arriver à maturation. Dans les premières années de son existence, force est de constater, que l’être se construit à travers l’expérience psycho-corporelle.

L’attitude de l’intervenant doit donc tenir compte de ses jeux subtils qui sont latents aux comportements, aux tempéraments, aux émotions de chacun. Il doit être attentif au fait que certains tempéraments peuvent parfois générer des réactions de rejet.  Son état doit au maximum rester serein et connaître son propre être en profondeur afin de mieux comprendre l’autre et l’accueillir sans jugement dans sa différence.

Lecture conseillée pour ce sujet : Cyrulnick, Rudolf Steiner, Montessorie

Bruxelles, 20 novembre 2016
Xanthippe Lazaridis


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