Etre dans l’observation, à l’écoute, dans le moment présent et le non-faire sont des états de pleine conscience naturels chez le petit enfant. Il le fait spontanément sans réfléchir, sans pensées, sans attente. Il est tout simplement.
Puis, avec les années il perd progressivement cette aptitude, cette compétence innée. Pourquoi ? car il entre dans sa vie d’apprentissage. Et le basculement à plus ou moins lieu avec l’apprentissage de l’écriture et de la lecture, à partir de la rentrée en première primaire, plus ou moins 6 ou 7 ans.
Entre 0 et 6 ans, l’enfant se rêve, s’invente et se réfléchit de l’intérieur. Le corps est le domaine d’exploration, les sens découvrent… le tout-petit prend connaissance de son environnement à travers son corps. Le regard est très souvent tourné dans l’être. On le croit perdu dans des rêveries… c’est parfois le cas… mais la plupart du temps, il ne pense à rien, il est simplement absorbé par son être.
C’est ce que les méditants cherchent une fois adultes à re-trouver !
Bien entendu, cette perte de l’état « absent » varie d’un enfant à l’autre. Et dans beaucoup de cas, l’assise, l’observation et le silence intérieur reste des comportements propres à certaines personnalités.
Cependant, il est fort à constater que la plupart des enfants, noyés dans le plus, encore plus à faire, à apprendre, à emmagasiner, à regarder, perdent le temps qui jadis leur était donné de droit pour se poser sans rien leur demander.
J’exerce depuis 2012 dans les crèches, et j’ai instauré en fin de session des moments de détente. Ces moments sont variés et spécifiques à la petite enfance.
- Des moments de découvertes de sons – qui fait quoi ? ou qu’est-ce que c’est ?
- Des moments d’écoute de musique de la nature en étant couchés au sol
- Des moments de mouvements spontanés également au sol
- Des moments de silence accompagnés de flûte japonaise en arrière plan
L’assise silencieuse permet la détente du corps mais aussi de l’esprit. L’enfant est mis en condition pour observer, pour écouter, pour s’asseoir tranquillement sans attendre quoi que ce soit.
Une musique douce et apaisante en arrière plan suggère le silence intérieur.
J’aime beaucoup utiliser la flûte japonaise car elle respire l’espace. Elle donne de l’ampleur et se veut aussi verticale qu’horizontale. Mais l’utilisation de la musique douce est appropriée. Ou alors, la musique de la nature (forêt, prairie, la mer,…).
L’enfant est spontanément transporté dans l’ici et maintenant. Il sait le faire de manière naturel, sans artifice. Il le fait tout le temps même quand il est occupé.
Mais le fait de voir un adulte assis dans le silence, les yeux fermés, et qui ne fait rien, le rappelle à lui-même. Lui permet de le faire quand il a envie sans être jugé, sans être interrompu, happé par l’adulte qui le sort de son « absence ».
Dans les établissements et en groupe, le tout-petit est tout d’abord dans l’observation de l’adulte assis dans le silence. Mais tout doucement, sans s’en rendre compte, il est lui-même assis dans le silence et se calme. Cet instant lui offre une paix.
Il est très intéressant d’observer se basculement qui s’opère si on lui donne le temps et l’espace pour se faire, se vivre.
Pour les adultes, l’enfant et surtout le tout petit en est capable (pas de manière spontanée mais si on le lui « impose »). Mais je ne leur demande pas de faire quelque chose. Je leur demande juste de rester assis… puis en me regardant dans la non-action (la musique appropriée aidant), ça les invite à faire de même.

Nous trouvons tout naturel qu’un bébé soit absorbé dans le silence de son être ou à l’écoute du moment présent. Mais dès que l’enfant se met en mouvement, nous trouvons plus difficile ces moments où rien ne se passe. Nous, les adultes aimons voir les enfants bouger car c’est tout à fait normal ! Mais quand l’adulte lui-même se met en condition de tranquillité et de paix intérieur, cela invite l’enfant à ne pas oublier ces moments où tout petit, bébé, il le faisait spontanément.
L’adulte montre l’exemple. Et par là même, montre le chemin de l’introspection, de l’écoute intérieure et profonde.
Retrouvons tous, des petits moments avec nos enfants où le but n’est pas de faire mais d’être. S’asseoir en silence sans rien attendre même 1 à 3 voire à 5 minutes suffisent pour donner l’envie à l’enfant de faire la même chose. Nous devons montrer l’exemple. Car si nous ne le pouvons pas… ils ne le pourront pas non plus. C’est aussi simple. La tranquillité de l’être passe par une tranquillité du corps et de l’esprit. Plus vous le pratiquerez, plus vous le ferez facilement. Le faire avec votre enfant régulièrement leur donnera la faculté de le faire et de le reproduire même quand vous n’êtes pas là.
Xanthippe Lazaridis
Le 6 février 2017